Durant mes recherches sur la musique yéménite, mon attention avait été attirée par un mode d’expression singulier de l’émotion musicale, pratiqué par le musicien Yahyâ al-Nûnû. Au cours de nuits musicales-marathons, il immergeait ses auditeurs dans un océan de mélodies envahissantes, tout en vivant lui-même sa musique dans une sorte de « transe» créatrice où le luth se transformait en un partenaire humain, un « fils» accompagnant sa voix. À travers cette métaphore vivante, sa propre émotion et celle de ses auditeurs se stimulaient réciproquement. Par une description phénoménologique des relations de la musique à la conversation intérieure, aux mécanismes de la mémoire involontaire et d’un langage non verbal, j’essaie de dégager une temporal...