Saint Martin, l’abbatiola de Trèves

Cet article a pour objectif d’étudier l’histoire de l’abbaye Saint-Martin à Trèves depuis ses débuts jusqu’au xie siècle. Bien que dédié à l’un des saints les plus populaires de la Gaule au haut Moyen Âge, ce monastère n’a jamais joué un rôle majeur dans la métropole mosellane, qui était l’un des sièges épiscopaux les plus importants de la Germanie avec ceux de Cologne et de Mayence. C’est sans doute dans la rivalité entre ces trois métropoles que l’on trouve la clef pour comprendre la faible vénération de l’évêque de Tours à Trèves. En effet, depuis la fin de l’époque carolingienne, les prélats de ces villes ont essayé d’obtenir des prérogatives telles que la primatie, notamment à travers la promotion du culte des évêques fondateurs des sièges ou celui d’Hélène, mère de Constantin. Martin de Tours bénéficiait lui aussi d’une vénération importante, mais seulement à Cologne et à Mayence. Cela explique certainement pourquoi Saint-Martin resta une abbatiola à Trèves : les clercs mosellans n’étaient pas en mesure de défier, dans le domaine de ce culte, leurs concurrents rhénans.This paper deals with the history of St Martin, one of the numerous abbeys of Trier, from its beginnings to the 11th century. Although dedicated to one of the most popular saints in Gaul during the early and the high Middle Ages, this monastery never played an important role in the city on the Mosel, the seat of one of the three main archbishoprics in the east Frankish realm and later in the German Empire. It is certainly the rivalry with the other two great metropolitan Churches – Cologne and Mainz – which offers the key to understand why the cult of St. Martin was less popular in Trier. Since the late Carolingian period, the archbishops of these seats claimed prerogatives like the primacy by celebrating outstanding cults as those of the founding bishops or of Helena, the mother of Constantine. The veneration of Martin of Tours, too, played an important role in the religious life, but only in Cologne and Mainz. This explains certainly why St Martin of Trier always remained an abbatiola: in the domain of this cult, the clergymen of the Mosel could never defy their rivals from the Rhine