Fortunes médiévales du culte de saint Alexis

En amont des études consacrées au culte de saint Alexis à l’époque moderne, cet article vient en rappeler les débuts durant le Moyen Âge et tente de cerner comment la légende latine a circulé dans les versions qui ont rapidement fleuri en diverses langues vernaculaires. En se tenant à la comparaison de trois Vies françaises des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, on observe comment, à partir de la trame latine inchangée, les auteurs ont utilisé ce récit pour illustrer les fastes de la vie aristocratique mais, surtout, scruter les replis de la conscience individuelle, celle du héros comme celles de son épouse ou de ses parents. Dès le Moyen Âge, sont ainsi posés les premiers jalons littéraires de ce conte, appelés à de riches développements, jusqu’à l’époque contemporaine. Mais le modèle de sainteté illustré par la Vie de Alexis, notamment la volonté du héros de vivre un mariage chaste, n’a pas été retenu par la pastorale, ce qui explique le faible rayonnement de ce culte, à s’en tenir aux indicateurs habituels : prières, images et dédicaces d’églises, de chapelles, d’autels ou de confréries.This paper presents the origins of « La Légende de saint Alexis » and how this narrative was introduced in Western Europe, through Spain and Rome. The church reformers appreciated it to exemplify the ascetic way of life. But its more important success begins with its translations in many vernacular languages. Through a few examples of these, in old French language, it can be demonstrated how the authors, who did not change the Latin story, inserted in it some new elements: details of the everyday life, moral instructions and a close attention to the conscience of the hero and the scruples which touched him, specially about the wife he had abandoned. But this strange model of a couple contracting a marriage without any form of common life was not attractive and not diffused by the clergy who did not consider it pertinent for lay people, except some Spiritual Franciscans. The Alexis’s cult was limited: for instance, very few chapels were dedicated to him