Une « convergence forcée » ?

L’expansion des neurosciences a conduit certains neurologues et psychiatres à repenser l’idée d’une fusion de leurs spécialités au sein d’une discipline neuropsychiatrique commune. A partir de l’ethnographie du développement d’une technologie thérapeutique pour des troubles neurologiques et psychiatriques par une équipe de neurosciences, cet article analyse en quoi ce projet interroge le statut épistémologique de la psychiatrie, de ses méthodes et de ses objets. Il décrit les différents dispositifs de recherche et de soin au sein desquels neurologues et psychiatres collaborent ainsi que les formes de pratiques, figures du malade et définitions des troubles qui en émergent. Si la technologie autorise l’ouverture de lieux de pratique communs, l’interrogation symétrique d’événements et la translation de problématiques entre les acteurs, le projet neuropsychiatrique se heurte cependant dans le soin à l’irréductibilité de la définition du trouble et du patient psychiatriques à la focale biologique.The rise of neurosciences has led certain neurologists and psychiatrists to consider the idea of the merger of their clinical specialties in a common neuropsychiatric discipline. Based on an ethnography of the use of a therapeutic technology for the treatment of neurological and psychiatric disorders in a neuroscience center, this article explores the epistemological status of psychiatry, its methods and its objects. I describe the research and therapeutic organizations within which neurologists and psychiatrists collaborate and the forms of practices, perspectives of patients and disorder definitions that are shaped therein. The technology opens common spaces of practice for the actors. It also creates an opportunity for psychiatry and neurology to provide symmetrical questionings of clinical events. However, the neuropsychiatric project appears to be bounded by the irreducibility of the psychiatric patient and disorder to biological determinism