Situation coloniale et pratique de l’archéologie en Indochine

En Indochine, la multiplicité des forces en présence, qu’elles soient occidentales ou asiatiques (avec la constante pression exercée par la Chine sur ses marges), incite à une analyse renouvelée des théories concernant le rôle joué par l’archéologie dans le développement du modèle colonial. Vanter les mérites des civilisations passées de l’Indochine à travers leur vestiges archéologiques n’était pas seulement un moyen de mettre en valeur la colonie aux yeux des Français, il s’agit aussi d’un véritable enjeu stratégique, politique et économique, au cœur de la mission civilisatrice coloniale. Cependant, la pratique archéologique en Indochine ne peut se réduire à un outil de gouvernance de l’État colonial. L’analyse de l’organisation du service archéologique de l’École française d’Extrême-Orient, des pratiques concrètes de la fouille telles qu’elles sont appliquées à l’époque et de la porté des interprétations des découvertes permet de mettre en perspective cette idée en envisageant un aspect moins connu de l’histoire de l’archéologie coloniale en Indochine. La mise en parallèle des pratiques coloniales et de leurs prolongements dans le Viêt Nam indépendant incite à une réflexion sur les volontés accompagnant ces pratiques ainsi que sur l’espace politique et sociale vers lequel elles se sont tournées.Rethinking of the interactions of the multiple cultural, economic, and political forces present in Indochina, including French, Vietnamese, and Chinese, also calls for a renewed analysis of the role played by archeology in the development of this colonial society. Praising the virtues of past civilizations of Indochina through their archaeological remains was both a project of promoting the colony aimed at the French public and a politically and economically important issue placed at the center of the colonial civilizing mission. However, archaeological practice in Indochina can not be reduced to a tool of governance of the colonial state. Analyzing the organization of the archaeological service of the French School of the Far East, the concrete practices of excavation of the time, and the various interpretations and impacts of the discoveries allow us to consider a lesser known aspect of the history of archeology in colonial Indochina. Finally, the parallel between colonial practices and their extensions in post-independence Vietnam invites us to think on the intentions accompanying these practices as well as the social and political spaces towards which they were aimed