Le luxe alimentaire à Venise à la fin du Moyen Âge et au début de l’époque moderne : entre lois somptuaires et fastes dogaux

Ayant assis sa fortune sur les trafics maritimes, Venise figure au premier rang de la révolution commerciale qui apporte, à partir du XIIe siècle, une énorme variété de biens de luxe sur les marchés italiens et contribue à bouleverser les équilibres politiques et sociaux : le corpus des lois somptuaires s’avère donc particulièrement consistant dans cette très grande ville d’Occident mais il présente des particularités notables, tant dans les produits touchés, la population visée que dans ses étapes. Cette contribution se propose de mettre en lumière les phases de la législation sur le luxe alimentaire à Venise, d’en analyser les enjeux et d’en mesurer l’efficacité. Au cours du Moyen Âge et du début de l’époque moderne, les lois somptuaires, tout en s’efforçant de combattre les fastes alimentaires privés, tendent à réserver progressivement l’usage du luxe alimentaire aux pompes publiques.Venice, having established its wealth through maritime commerce, was in the front rank of that commercial revolution which, beginning in the 12th century, caused an enormous variety of luxury items to appear in Italian markets, and this profusion was in turn a destabilizing force in Italian cities. In a very large Western city such as Venice the corpus of laws regulating consumption became particularly well established, but it does present notable peculiarities, as concerns the products regulated and the populations targeted. The present article is intended to display the phases the regulation of luxury foodstuffs went through in Venice, and to analyze the goals and eventual effect of the legislation. Over the period of the Middle Ages, up to the beginning of the modern era, sumptuary laws attempted to limit private celebrations involving excessive consumption, and in effect tended to limit the consumption of luxury food items to public ceremonies