« Les choux sont verts » (Gertrude Stein) : les adaptations intersémiotiques d’Elizabeth Lennard

Dans cet entretien, l’artiste américaine multimédia Elizabeth Lennard retrace la genèse de son travail d’adaptation intersémiotique de plusieurs pièces de Gertrude Stein, incluant traduction et mise en scène. Avec l’écrivaine Danielle Mémoire, elle a traduit Stein en français pour la scène, dans le cadre de lectures-performances et d’un opéra. Les photographies d’Elizabeth Lennard inspirées par les textes de Stein – que ce soit ses conceptions théoriques comme la notion de pièce-paysage, des éléments biographiques comme les paysages français du Bugey, ou des objets mentionnés dans ses pièces – sont déclinées en plusieurs formats, à partir de clichés argentiques. De la technique de la planche-contact, agrandie puis peinte, en passant par les boîtes lumineuses réalisées à partir de la pellicule, la projection d’images animées pendant la représentation des pièces et de l’opéra, jusqu’à la réalisation de linge de table portant les mots de Stein, le texte steinien est traduit visuellement pour en montrer le côté concret, ancré dans le quotidien et dans l’histoire. Il ne s’agit pas d’un travail d’illustration mais de déconstruction de l’écriture cubiste de Stein, de mise à plat de ses images, et d’une réflexion sur la répétition, sur le temps et sur les variations d’échelle. Texte et images se côtoient et se réfléchissent, tandis que la littéralité de la traduction linguistique contraste avec la liberté de l’adaptation intersémiotique.In this interview, multimedia American artist Elizabeth Lennard recalls the genesis of her intersemiotic work on several plays by Gertrude Stein, involving translation into French, stage direction and set design. In collaboration with French writer Danielle Mémoire, Lennard translated several of Stein’s plays into French and presented them as staged readings and performances. They also worked together on an opera libretto. In her photographic work, Lennard finds inspiration in Stein in a variety of ways, from Stein’s theory on plays as landscapes—in relation to the actual French landscapes from which Stein’s theory materialized—, to objects mentioned in the plays. Lennard uses traditional photo negatives to make contact sheets that she then enlarges and paints, or makes light boxes, or videos projected onto the stage during performances of the plays and opera. With these visual effects, Lennard’s purpose was to convey the most concrete aspects of Stein’s writings, very much rooted in daily life and anchored in history. Lennard does not aim to illustrate Stein’s works, but rather to deconstruct her cubist writing style by laying out the images side by side. It is also a reflection on repetition, on the passing of time and on variation of scale. Text and pictures are meant to interact, while there is an interesting contrast between a deliberately literal translation of Stein’s texts into French, and a free intersemiotic adaptation of the same texts into pictures