Jouer avec l’horreur

L’expression « Mythe de Cthulhu » fut proposée par August Derleth pour désigner l’ensemble des phénomènes surnaturels présents dans les récits de Howard Phillips Lovecraft et des œuvres qui s’en inspirent. Cette expression, utilisée jusque dans les jeux de rôle contemporains, pose la question de la possibilité d’analyser le contenu de ces produits à l’aune de travaux scientifiques portant sur les mythes et les mythologies. Le présent article propose d’étudier le « mythe de Cthulhu » sous l’angle des théories de la réception des mythes proposées par Hans Blumenberg, afin de comprendre la diffusion des ressources auxquelles il renvoie. L’usage de ces références contribue à la mise en scène de l’horreur et rend ainsi possible ses appropriations ludiques en instaurant une distance avec le contenu des représentations. En effet, les mécanismes des jeux, tout comme les représentations de l’horreur, donnent une forme concrète à l’indicible et réduisent alors sa part suggestive.The “Cthulhu mythos” expression was created by August Derleth in order to designate the supernatural phenomena which are found in Howard Phillips Lovecraft writings and in the works that they have inspired. This expression, which is also used in contemporary role playing games, brings the question of whether one can study the content of those productions in the light of the theories about myths and mythologies. This article offers to study the “Cthulhu mythos” according to Hans Blumenberg’s theories about myth reception, in order to understand the diffusion of the resources to which it relates. The use of those references contributes to the mise en scène of horror and allows playful appropriations. At the same time, it creates a distance with their content. Indeed, the game mechanisms, as well as the representations of horror, give a concrete form to the unspeakable and reduce its suggestive part