La catastrophe dans les gazettes du XVIIIe siècle : un art du chaos

International audienceLa catastrophe dans les gazettes du 18 e siècle : un art du chaos « […] il paraît par cette lettre qu'on a trop exagéré les désastres causés par ce funeste accident, et qu'ensuite on en a trop diminué les horreurs » (Gazette d'Amsterdam, 28 mars 1783). Lors du colloque de Lyon de janvier 2005, consacré à la catastrophe au 18 e siècle, nous avons choisi de prendre le mot catastrophe dans son sens moderne en limitant son champ à celui des catastrophes naturelles (épidémies, tremblements de terre, inondations, etc.). Dans le livre tiré de ce colloque (L'Invention de la catastrophe au 18 e siècle : du châtiment divin au désastre naturel 1), une section importante est consacrée à la presse, sujet étudié depuis longtemps par le groupe qui était à l'origine de ce colloque, le groupe d'études du 18 e siècle de Lyon (partie constitutive de l'UMR LIRE 2 , CNRS-Lyon2). Ce travail a montré, de 1720 (peste de Marseille) à 1783 (tremblement de terre de Calabre) en passant par 1755 (tremblement de terre de Lisbonne), un intérêt croissant de la presse pour ces événements et un traitement médiatique qui annonce de plus en plus le journalisme moderne, fasciné par les catastrophes. Je m'intéresserai ici à cette naissance d'un journalisme catastrophiste dans les gazettes (journaux d'informations politiques) de langue française, en la croisant avec la problématique proposée par Benoît de Baere sur la question des genres narratifs utilisés par les textes qui rendent compte de ce type d'événement. Cette enquête part donc de l'hypothèse qu'on peut trouver dans la presse des textes organisés par des genres codifiés, et peut-être assister à l'émergence de nouveaux genres. L'exploration de cet « art du chaos » se fera en deux parties ; la première explorera en quoi l'annonce de ce type de faits relève du chaos. La deuxième montrera comment une élaboration consciente et même esthétisante tente de mettre un peu d'ordre dans ce désordre. Expliquer, annoncer, faire voir, sont les trois postures que l'on peut y voir à l'oeuvre, la dernière étant la plus féconde en innovations