Enthousiasme social et jubilation intellectuelle : question de radicalité pédagogique à l’université ?

International audienceCette communication se propose d’apporter les premiers éléments d’une recherche collective, qualifiée de « coopérative », à propos des conditions (et premiers effets) de transformation pédagogique dans l’enseignement supérieur. La coopération, au sens de « faire œuvre commune », spécifie la démarche de recherche au double niveau de la production des données et de leur analyse, auxquelles les étudiants (licence 3 et master) participent conjointement avec les doctorants, jeunes docteurs et enseignants-chercheurs. Nous circonscrirons notre propos à l’étude d’une expérience exploratoire conduite conjointement avec les étudiants de licence 3 de sciences de l’éducation, en cours magistral en amphithéâtre sur deux semestres, et ce durant les trois dernières années. Les données recueillies proviennent de multiples entretiens individuels et collectifs, d’échanges professeurs-étudiants lors de séances de débat sur l’enseignement en cours, d’évaluations semestrielles produites par les étudiants, et d’un journal de terrain. Plus précisément encore, cette communication s’efforcera de montrer l’importance cruciale, communément abandonnée au talent des professeurs et au hasard de la composition des promotions étudiantes, de l’expérience socioaffective à travers laquelle se construisent (ou échouent à se construire) les savoirs, et s’élabore (ou pas) la pensée. Il sera alors question de la joie, du désir et de l’implication commune des étudiants dans l’activité d’étude. Nous introduirons un questionnement, empiriquement étayé, sur le problème des rapports entre l’enthousiasme et l’étude comme l’une des conditions principales, pourtant largement ignorée, du succès de l’enseignement universitaire. A l’écart des débats et des expérimentations qui se multiplient à propos des technologies numériques (Endrizzi, 2012 ; Loison et Mayen, 2015), sans pour autant négliger leur intérêt, nous interrogerons la part des affects (Deleuze, 1981) dans l’expérience étudiante et convoquerons le concept de subjectivation (Foucault 2001) pour désigner un nouvel enjeu possible du processus d’apprentissage-enseignement à l’université. L’analyse du matériau empirique concernant l’expérience conjointe enseignant-étudiant en amphithéâtre portera sur quatre aspects : discours et éthos enseignant ; organisation du travail ; dimension intellectuelle ; dimension existentielle.Les résultats attendus sont ceux d’un accroissement significatif de l’implication et de la créativité des étudiants et des professeurs dans ce processus, d’un rapport plus critique dans l’appropriation de la culture, et d’une amélioration des réussites académiques. Les premiers résultats qualitatifs obtenus, sans nier les obstacles rencontrés, sont encourageants. L’arrière-plan philosophique de ce travail de recherche est celui, éthique, de l’expérience de la joie, de sorte que l’on est fondé à envisager une nouvelle approche, à la fois théorique et méthodologique, que l’on pourrait qualifier après Deleuze (ibid.), d’éthologie comme « étude des manières d’être » (éthos), instrumentée par une « étho-analyse », proche de la clinique