Comment les tempéraments affectifs influencent l'adhésion thérapeutique : approche chez le sujet bipolaire euthymique

Introduction : Le trouble bipolaire est une pathologie chronique responsable d’un handicap fonctionnel majeur. Plusieurs auteurs ont proposé la notion de spectre des troubles bipolaires, incluant des formes d’intensité et/ou de sémiologie plus hétérogènes résultant d’une base éthiopathogénique commune. Les tempéraments affectifs, qui font référence à des éléments innés et biologiquement déterminés de la personnalité, sont considérés comme des marqueurs sub-syndromiques d’une vulnérabilité affective, faisant l’hypothèse d’un continuum allant du tempérament au trouble de l’humeur. L’impact du tempérament a été peu étudié sur le processus d’adhésion thérapeutique. L’objectif de cette étude est d’établir un lien entre les dimensions tempéramentales de patients souffrant de trouble de l’humeur et l’adhésion au traitement médicamenteux.Matériel : Il s’agit d’une étude transversale observationnelle. Nous avons inclus 46 patients souffrant de trouble bipolaire, en l’absence d’épisode thymique caractérisé en cours selon le DSM-5. Les patients ont eu une évaluation clinique à l’aide d’hétéro- et d’auto-questionnaires. Le tempérament a été évalué par la Temperament Evaluation of Memphis, Pisa, Paris and San Diego (TEMPS-A). L’adhésion thérapeutique a été mesurée grâce à la Medication Adherence Rating Scale (MARS). Nous avons réalisé une analyse univariée en utilisant deux approches complémentaires : soit comparative par seuil, soit de manière quantitative par corrélation.Résultats : Les deux approches retrouvent de manière significative des résultats concordants, que ce soit pour l’analyse comparative ou par corrélation, pour les tempéraments cyclothymiques (respectivement p=0,007 et p=0,001) et irritables (respectivement p=0,001 et p=0,004), qui peuvent être considérés comme des facteurs de mauvaise adhésion au traitement. La dimension dépressive est retrouvée comme facteur de mauvaise adhésion seulement lors de l’analyse en corrélation (p=0,006). Le tempérament hyperthymique est lui aussi retrouvé comme facteur de mauvaise adhésion mais seulement lors de l’analyse comparative (p=0,008). L’étude de la dimension tempéramentale anxieuse en revanche ne retrouve pas de résultat significatif sur l’adhésion thérapeutique.Discussion : La prédominance des dimensions tempéramentales instables de type cyclothymique ou irritable peut permettre au clinicien de repérer des profils de patients pour lesquels il existe un risque de mauvaise adhésion. La mise en place de mesures psychoéducatives personnalisées pourrait permettre de limiter l’impact négatif de ces traits tempéramentaux sur l’adhésion thérapeutique. Ces résultats devront être confirmés lors d’études prospectives sur un plus grand nombre de participants, en prenant en compte les facteurs confondants