Bains de mer, sports et loisirs sur les plages du Débarquement de Normandie. Le cas d'Arromanches après la Libération (1945-1960)

Sous la direction de Luc Robène. ISBN : 978-2-7535-2126-1.Affiliation EA 4260 - Intitulé actuel : Centre d’Etude des Stratégies et des Actions Motrices et Sportives (CESAMS) mais entre 2008 et 2011 autre intitulé : Information Organisation et Action (IOA).International audienceAvec la terrible épreuve du Débarquement, le déluge de bombes, les affrontements meurtriers entre les Alliés et les troupes d’occupation, les plages de Normandie ont sombré dans l’horreur de la guerre (Quellien, 2008). A Arromanches, haut lieu des combats et site d’implantation du gigantesque port artificiel allié (Lecornu, 2006), plus rien ne sera comme avant. La station balnéaire d’antan doit se reconstruire mais aussi assumer et entretenir un passé historique. A la Libération, se pose alors la question de la préservation du site, de sa renaissance touristique (Baptiste, 2003). Ce lieu tragique peut-il renouer avec les bains de mer, les jeux insouciants, les loisirs sportifs, en vogue localement avant le second conflit mondial ? Cet ensemble de pratiques corporelles apparait-il légitime, là où tant d’hommes et de héros sont tombés pour faire reculer l’ « Ordre nazi » (Durand, 1990) ? La vie touristique et sportive peut-elle reprendre, doit-elle être encouragée, prend-elle d’autres formes sur les sites du Débarquement ? La présence visible du port artificiel et de ses caissons en béton armé, même après le démontage des structures en acier, laisse une trace indélébile de la guerre dans le paysage. Le pratiquant de voile, de canotage, le simple amateur de bains de mer et de jeux de plage a-t-il encore sa place ? Peut-il s’autoriser à rire, jouer, s’ébattre sur ces lieux de mémoire ? La question n’est pas uniquement pratique, et liée à des problèmes de sécurité, elle pose aussi des problèmes de conscience et d’éthique. La réponse viendra de la Sous-préfecture et du Service des Ponts et Chaussées de Bayeux. Raymond Triboulet, nommé sous-préfet de Bayeux par les autorités gaullistes en juin 1944, met en place un vaste programme permettant de procurer à la zone du Débarquement une attraction nouvelle. Nettoyage, déminage, aménagement des sites, commémorations, mais aussi reprise des activités touristiques balnéaires sont au programme.L’analyse des archives municipales d’Arromanches permet de mettre à jour les initiatives envisagées afin de conférer au site un visage attractif, plein de vie. Les délibérations des conseils municipaux, les documents relevant des aménagements de la station, mais aussi la presse locale présentent de nombreux éléments démontrant le développement des pratiques physiques et sportives sur les plages du Débarquement.Le contraste apparait alors surprenant entre la culture de la commémoration entretenue (Quellien, 2009), organisée par les autorités publiques et les incitations multiples à la « renaissance physique et sportive » dans la station. Symboles de mémoire et de vie s’entrechoquent. Les pratiques corporelles et balnéaires semblent jouer un rôle spécifique dans cet équilibre incertain : elles participent à la construction d’un tourisme de guerre et constituent un attrait supplémentaire, un atout pour le développement de la station balnéaire d’Arromanches. Rapidement, la population revient entre les plages d’Omaha Beach et Gold Beach pour profiter des activités nautiques et prendre la mesure du « Jour le plus long » ou inversement