Quand le centre nautique municipal de Brest émergeait d’une arène inter-organisationnelle (1958-1980)

International audienceSoutenir la vitalité des sports nautiques est un moyen d'affirmer le caractère maritime d'une ville. A Brest, des fêtes maritimes sont organisées, quelques jours l'été, dès 1847 par la Société des Régates de Brest avec le concours de la municipalité. Toutefois, tout au long du 19e siècle et jusqu'à la fin des années 1930 les animations nautiques restent très ponctuelles. Après la seconde guerre mondiale, la durée des activités s'est étendue et le nombre de clubs de voile s'est accru. Ainsi, en 1958, la ville de Brest en héberge trois: le club nautique de la Marine, la Société des Régates de Brest (SRB) et le Yacht-club de la Rade de Brest, créé par d'anciens membres de la SRB récemment mis en minorité lors de l'élection de son comité directeur. De leur côté, les équipes qui se succèdent à la tête de la municipalité jusqu'à la fin des années 1970 se montrent toujours attentives à l'animation que produisent les activités nautiques organisées depuis leur territoire. Surtout, elles sont de plus en plus convaincues qu'une politique visant à dynamiser la pratique de la voile à Brest passe par une coopération durable entre les différents acteurs locaux. Or, jusqu'en 1975 la concrétisation du projet que portent les différentes municipalités ne peut être imaginée sans tenir compte de l'action menée par une poignée influente de dirigeants gravitant autour de la SRB et des associations qui lui sont liées. L'objet de ce texte sera de montrer combien la place occupée par cette coalition dans l'arène inter-organisationnelle (Cefaï, 2007) que contribuent à produire ensemble les pouvoirs publics locaux et les clubs de voile brestois, a pu, selon les moments, freiner ou bien faciliter le projet de la municipalité. On postulera que cette arène débouche sur un ordre négocié (Strauss, 1992), révisable selon les changements affectant les rapports de pouvoir et d'intérêt qui s'établissent entre les protagonistes. En fait, ce petit groupe de dirigeants et la municipalité sont tenus, bon gré mal gré, de maintenir entre eux un minimum de coopération en raison de leur interdépendance. D'un côté, la coalition SRB ne peut renoncer aux ressources économiques, à la reconnaissance sociale et au prestige qu'est susceptible de lui procurer l'aide de la municipalité si elle souhaite conserver aux associations qu'elle contrôle leur rang dans l'espace local. De l'autre, les édiles locaux ne peuvent pas se couper de ce groupe tant qu'ils ont le projet de faire advenir une organisation commune entre les clubs de voile brestois. Deux sources principales ont été mobilisées pour réaliser cette étude : les archives municipales et communautaires de Brest (délibérations municipales, revues de presse, dossiers sur les clubs de voile, le port de plaisance, …), et les témoignages d’acteurs de l’époque (deux anciens présidents de la SRB, un ancien élève du CFNB, un ancien responsable du centre nautique municipal, deux anciens maîtres d’EPS du service jeunesse et sport, un ancien président et deux anciens adhérents d’un club rival, un ancien président d'un club corporatif ayant rejoint le centre nautique municipal à ses tout débuts, un ancien responsable du centre nautique scolaire et un de ses collègues professeur d'éducation physique)