Introduction du dossier « Zones grises en Amérique latine »

International audienceAvec le repli de l’Etat sur ses fonctions régaliennes et les débats contemporains sur les attributs de sa souveraineté, les concepts de défense et de sécurité évoluent au gré des modifications des facteurs d’instabilité nuisibles à l’uniformité requise par la démocratie de libre marché. Dans ce contexte, les implications géopolitiques de l’émergence de pouvoirs locaux affranchis du cadre institutionnel en principe normatif figurent parmi les principaux défis opérationnels pour les régimes démocratiques en Amérique latine. Or les réactions classiques visant à remédier à cette marque souvent violente de la fragmentation du pouvoir public semblent obsolètes. Les réseaux constitués par les acteurs qui prospèrent au sein des « zones grises », foyers de gouvernance alternative de fait, et les flux de diverses natures qu’ils véhiculent s’articulent et sont relayés bien au-delà des frontières de ces espaces de non-droit, capables de se projeter et d’opérer à l’échelle transnationale. Dès lors, la stratégie de pacification consistant à user de la force publique et/ou à la privatiser pour compenser le recul problématique des structures étatiques et interétatiques dans le contrôle politique des crises et des conflits – malgré le maintien de l’asymétrie favorable aux acteurs criminels qui en résulte – apparaît comme une des modalités de la globalisation