Les apports de l'action collective à la construction de la qualité : le cas des associations de commerçants dans les filières céréalières au Mali. Compte-rendu de la journée du 5 mai 2003

La promotion de la qualité s'impose progressivement au marché des céréales et à la politique agricole du Mali. Elle devient une condition d'élargissement des exportations sur le marché régional et du développement de la transformation pour la demande alimentaire urbaine et l'alimentation du bétail. Dans un contexte où les moyens d'intervention des politiques publiques libéralisées sont extrêmement réduits, elle peut fournir une contribution importante à la régulation du marché. Notamment, la segmentation du marché (qualité/prix) est vue comme un moyen permettant d'améliorer à la fois la valorisation des céréales et la sécurité alimentaire des consommateurs les plus pauvres. La qualité des céréales sèches est hétérogène et marquée par de grandes variations spatiales et temporelles. A partir des deux principaux attributs (propreté et taille des grains) retenus par les opérateurs, la qualité des mil est signalée en 2 grandes catégories correspondant aux zones de production de Ségou et de Koutiala (Sikasso). Le mil de Koutiala est préféré par les consommateurs et bénéficie d'un label de fait (gros grains et absence de poussière). Les autres céréales contiennent un taux d'impureté élevé et variable. L'incertitude sur la qualité est source de coûts de transactions élevés pour les commerçants; d'autant que s'ajoute à celle-ci une incertitude forte sur la mesure (contrôle des sacs au moyen d'une sonde). Les modes de coordination verticale en vigueur dans les filières (l'organisation traditionnelle en réseaux marchands hiérarchisés ou les relations fidélisées de réciprocité marchande) ont permis jusqu'ici de pallier les effets négatifs de l'incertitude sur le signal de qualité et de réduire les coûts de mesure. Mais l'efficacité de ces formes de coordination rencontre des limites dès lors qu'il s'agit de répondre à des normes de qualités plus exigeantes (notamment à l'exportation) ou à faire face à des comportements opportunistes de nouveaux acteurs en marges des réseaux traditionnels. Plusieurs groupements de commerçants de céréales s'étant créés ces dernières années, on cherche à analyser leur contribution à la promotion de la qualité. Le cadre d'analyse de l'action collective de M. Olson est mobilisé à cet effet. Après un repérage de la performance des différentes formes de coordination horizontale, l'analyse est consacrée plus particulièrement à la success story de l'association Danaya de la ville de San. Approvisionné à partir de 2 zones de collecte aux fortes différences de qualité, le marché de San a vu les prix des céréales s'aligner à la baisse suite à des pratiques opportunistes. Les grossistes de production ont mis en place un dispositif de coordination pour regagner la réputation de leurs céréales de bonne qualité. L'action collective a consisté à établir un système de règles pour crédibiliser un signal de qualité. Elle porte sur un bien collectif de type bien à péage. Le dispositif comprend une norme, un système d'information et une sanction (incitation négative) dont l'application s'appuie sur le relais des autorités locales (amende sous forme monétaire). Les conditions de réussite de l'action collective de Danaya et les possibilités de reproduction ou d'extension de ce mode complémentaire de coordination sont discutées à partir des critères d'Oison. (Résumé d'auteur