Individuation, filiation et métamorphoses biomédicales

National audience« Individu », étymologiquement, signifie non divisé, non divisible. L’individualité, philosophiquement, fait problème depuis très longtemps, à l'exemple de la décomposition de l’être humain à laquelle se livre Descartes, corps et âme, ou encore de la vision multiple de la personnalité que décrit Hume, qui s’écarte manifestement d’une unité individuelle. Toutefois, il y a dans la constatation d’une unité de constance personnelle du moi quelque chose qui s’apparente encore à une individualité, quelque chose qu’on appelle plus couramment identité, identité problématique qui tend à s’affronter avec la réalité multiforme du corps. Le problème de l’individualité personnelle serait entre autre à la fois celui de son apparition lors de la naissance et celui du changement, incessant mais jamais absolu, de la personnalité humaine et du corps humain. Si cette personnalité et ce corps ne se laissent pas vraiment diviser, on a pourtant bien des difficultés à les saisir en une unité simple, homogène, et à concevoir la procréation d’un individu par un autre. N’est-on pas obligé dès lors de parler d’une réticulation, à la fois en l’homme et entre les hommes, sorte d’individualité complexe ? Comment comprendre alors cette association paradoxale ? Comment parler encore d’identité ? Comment concevoir qu’un individu puisse se constituer, pour reprendre un terme cher à la phénoménologie, ou encore : comment concevoir un véritable processus d’individuation ? C’est à cette question, en nous appuyant sur le cas exemplaire de la filiation que nous nous confrontons ici