Langue et identité en Irlande du Nord aujourd'hui

The evolution and status of the Irish language in Northern Ireland remains complex and controversial, being bound up with political and identity issues. For Protestants and/or Unionists, Gaelic is closely associated with the nationalist struggle ; it is perceived as the language of rebellion and as such, its use and teaching were long marginalised by the Northern Irish authorities. Since the beginning of the 70s, Sinn Fein and the IRA have largely succeeded in appropriating the Irish language. Yet, it is also possible to consider the language as common ground to be enjoyed and shared by the two communities as part of a common heritage. Thus, the discourse of political appropriation of Gaelic has lately been countered by a cultural discourse, powerfully backed up by the British government and seeking to put cultural identity at the heart of an ambitious programme of reconciliation. The generous funding at both regional and European levels as well as the renewed interest in Gaelic-language projects may be seen as a strategic move to challenge the republican monopoly over Gaelic ; one of its side-effects has been the launching by the Unionists of a campaign to discover/ recover Ulster-Scots and claim for the Protestant community in Northern Ireland a specific, Ulster-Scottish identity as opposed to the standard British identity the « two tradition approach » usually reduces them to.L'évolution et le statut de la langue irlandaise en Irlande du Nord demeurent fort complexes et controversés de par leurs liens avec des questions politiques et identitaires. Pour les protestants et/ou unionistes, le gaélique s'impose comme un des symboles les plus visibles de la lutte des nationalistes, la langue de la rébellion ce qui explique la décision des autorités de la nouvelle Irlande du Nord après la partition de tout mettre en œuvre pour marginaliser l'usage et l'enseignement du gaélique. Depuis le début des années 70 en particulier, Sinn Féin et l'IRA ont tenté, avec un succès certain, de s'approprier le gaélique. Mais la langue irlandaise serait aussi, dans une autre perspective, susceptible de devenir un espace commun, partagé par les deux communautés d 'Ulster. Au discours d'appropriation politique de la langue s'oppose en effet un discours culturel, puissamment relayé depuis une dizaine d'années par les autorités britanniques, soucieuses de placer l'identité culturelle au centre d'un vaste programme de réconciliation. On peut voir dans l'intérêt et les financements accordés au gaélique dans le cadre de programmes culturels régionaux et européens une manœuvre de Londres pour dépolitiser la question linguistique et pour couper l'herbe sous le pied des républicains en les dépossédant d'un symbole puissant. Si c'est le cas, cette démarche a encouragé les tenants de l'unionisme à imiter les stratégies du mouvement gaélisant en Irlande du Nord à des fins de lobbying en lançant une campagne de découverte/promotion de l'Ulster Scots. Trop souvent réduits à une identité britannique dans le discours sur les deux traditions, les unionistes ont vu là un moyen efficace de se réinscrire dans une culture linguistique et historique spécifique que l'on pourrait qualifier d'ulstéro-écossaise, brouillant de nouveau les cartes du jeu identitaire et linguistique.Pelletier Martine. Langue et identité en Irlande du Nord aujourd'hui. In: Études irlandaises, n°26-2, 2001. La langue gaélique en Irlande hier et aujourd'hui, sous la direction de Danielle Jacquin . pp. 175-186