Le culturalisme face au racisme ou d'un naturalisme à un autre : le cas des études afro-américaines

North American cultural anthropology has reified culture, making of it an entity akin to nature. The net result is that in its critique of the naturalism in racist hypotheses it itself depicts another sort of naturalism thus corroborating the attitudes which it claims to oppose. Melville Herskovits' theory of « Africanisms » is a good example of this trend, in the context of « Afro-American studies », the specificities of the black communities in the Americas are reduced to an African inheritance. Reductions of this type have reinforced the arguments of those who in post-slavery American society declared that the former slaves who had now become citizens could not be assimilated. In reaction to these arguments, the ideology of Négritude, based on the findings of cultural anthropology, has taken the naturalisation of culture, which is the basis of culturalism to its utmost limits since, here, this naturalisation has taken the form of a racialisation. The latter, by encouraging all sorts of intolerance and sectarianism, still weighs heavily today in the ideological debate and in political life. For example, in the West Indies under French domination it could, in the future, facilitate in these countries, a neo-colonial type of solution to the crisis which they are experiencing.L'anthropologie culturelle nord-américaine, faisant de la culture une réalité en soi, une «seconde nature», est tombée, dans la critique qu'elle adressait au naturalisme des thèses racistes, dans un autre naturalisme et a ainsi abouti à conforter les attitudes qu'elle prétendait combattre. La théorie des africanismes de Melville Herskovits qui, dans le cadre des «études afro-américaines », réduit les spécificités des communautés noires des Amériques à des héritages africains en fait foi : une telle réduction est venue renforcer les arguments de ceux qui, dans les sociétés américaines post-esclavagistes, déclaraient inassimilables les anciens esclaves devenus citoyens. En réaction à ces arguments, l'idéologie de la Négritude — nourrie des travaux de l'anthropologie culturelle — a porté à son apogée la naturalisation de la culture qui est au fondement du culturalisme puisque, chez elle, cette naturalisation a pris la forme d'une racialisation. Cette dernière, en encourageant toutes sortes d'intolérances et de sectarismes grève encore aujourd'hui lourdement le débat idéologique et la vie politique, par exemple, des Antilles sous domination française et pourrait demain faciliter, dans ces pays, une issue de type néo-colonial à la crise qu'ils traversent.Giraud Michel. Le culturalisme face au racisme ou d'un naturalisme à un autre : le cas des études afro-américaines. In: L'Homme et la société, N. 77-78, 1985. Racisme, antiracisme, étranges, étrangers. pp. 143-155