La Table d'Héraclée et les origines du cadastre romain

Les lignes 32 et suiv. de la Table d'Héraclée imposent la charge de la réfection et de l'entretien des voies publiques dans la ville de Rome et ses continentia aux propriétaires d'édifices privés jouxtant ces voies, proportionnellement à la longueur de la façade. On considère en général qu'il s'agit là d'une innovation de l'époque césarienne, à laquelle en général on attribue ce texte. Mais peut-être Cic. 2 Verr. I, 130-153, avec Ps. Asc. p. 255 St., permet-il de penser que ce système fonctionnait déjà en 75 av. J.-C. Plus important : le système d'adjudication des travaux dont la charge retombera sur le propriétaire riverain, prouve que l'édile qui en est chargé devait disposer de documents assez précis concernant à la fois les personnes et les biens immobiliers en question, donc de type cadastral. Ces documents ne provenaient probablement pas du census, mais plutôt de déclarations concernant les propriétés bâties, et enregistrant en particulier leurs mutations (à cause de décès, de vente, d'hypothèques, etc.). On doit donc rapprocher cette procédure des fameuses et encore mystérieuses professiones dont il est question juste avant, aux lignes 1-20 de la T.H. Des déclarations foncières de ce type existent dans le monde ancien, mais tout particulièrement en Egypte romaine : les kat'oikian apógraphai d'une part, les déclarations obligatoires des mutations adressées aux bibliothèkai ton engtéseon de l'autre. Ni les unes ni les autres ne sont antérieures à l'époque romaine. On en déduit que l'administration romaine de la fin de la République disposait, en matière cadastrale, de moyens et de documents plus élaborés qu'on ne croit.Nicolet Claude. La Table d'Héraclée et les origines du cadastre romain. In: L'Urbs : espace urbain et histoire (Ier siècle av. J.-C. - IIIe siècle ap. J.-C.). Actes du colloque international de Rome (8-12 mai 1985) Rome : École Française de Rome, 1987. pp. 1-25. (Publications de l'École française de Rome, 98