SERVIUS ET LES MATHEMATICI : EXPLOITATION ET VULGARISATION DE L'ASTROLOGIE DANS LES COMMENTAIRES À VIRGILE *

International audienceDans sa biographie de Virgile, Donat précise au IV e siècle que le poète s'est intéressé de près à deux sciences : la médecine et la mathematica 1. Le mot est ambigu, et le ThlL (8, 472, 70) le comprend, dans cette citation, au sens de « mathématiques » ; mais il est très possible également qu'il renvoie à la mathesis, c'est-à-dire à l'astrologie au sens moderne, plus qu'à la science des nombres. Les commentaires virgiliens témoignent d'ailleurs davantage d'une exploitation de l'astrologie que des mathématiques. Dans ce cas, nous aurions ici une attestation de l'intérêt virgilien pour une forme de savoir très particulier, témoignage qui pourrait remonter au début du II e siècle, puisque Donat, on le sait, a emprunté l'essentiel de sa biographie à celle composée par Suétone 2. Si Servius, malgré Donat, n'a pas retenu ces détails pour sa propre version de la vie de Virgile, il note cependant en préface au livre 6 de l'Énéide : multa per altam scientiam philosophorum, theologorum, Aegyptiorum. Dans ce contexte latin et tardif, le terme Aegypti pourrait représenter des résurgences pythagoriciennes, voire des allusions gnostiques, mais aussi l'une des deux « écoles » de l'astrologie dans le monde gréco-romain, avec celle des « Chaldéens », même si ces appellations * Cet article est dédié à la mémoire de J.-H. ABRY, Maître de conférences à l'université Lyon 3, spécialiste de Manilius décédée en 2008. 1 Vie de Donat, 1 : Inter cetera studia medicinae quoque ac maxime mathematicae operam dedit. 2 Voir par exemple STOK 2010. Cela dit, il faut rester prudent sur ce genre d'affirmation et sur la méthode des biographes – et des commentateurs en général : de simples allusions dans l'oeuvre virgilienne à certaines sciences (on en trouve ainsi à la médecine ou à l'astrologie dans les Géorgiques 3) leur suffisent pour activer une méthode déductive / inductive parfois suspecte