La fabrique d’un mythe fondateur ancré dans l’avenir : la rhétorique interventionniste lors des procès-spectacles en URSS

International audienceThis article focuses on the place of temporalities in the process of identity construction, in continuation of A.-M.Thiesse’s work. This topic is approached here, through a study of interventionist discourse during Soviet show trials in the inter-war period (1928-1933). At that time, the Soviet authorities both exalted an image of allied intervention during the civil war in Russia and insisted simultaneously on the imminent danger of a new foreign armed attack against the USSR. The article analyses the process of creation and the objectives of thisamalgam, blurring the time frontiers between two events, one historical and another projected into the nearest future. The analysis shows that reshuffle of temporalities, which is characteristic of interventionist discourse, is mobilized by political power. Designed to advance multiple goals, it is namely thought to be a means of identity construction process. This example shows that the latter is not based only on creation of a past and a present shared by all the members of a community. The future and more generally the process of time frontiers blurring can also be thought to be a mechanism of social cohesion reinforcement.Cet essai développe une réflexion sur la place des temporalités dans le processus de la construction identitaire dans la lignée des travaux de A.-M. Thiesse. Cette thématique est abordée ici à travers l’étude du discours interventionniste pendant les procès-spectacles en Union Soviétique entre 1928 et 1933. Lors de ces procès, les autorités soviétiques exaltent une image de l’intervention alliée du temps de la guerre civile, tout en insistant sur le danger immédiat d’une nouvelle offensive armée contre le pays. L’article revient en détail sur la création et les finalités de cet amalgame systématiquement réitéré, au point que les frontières temporelles entre les deux évènements s’effacent. L’analyse de l’amalgame montre que les remaniements des temporalités, caractéristiques du discours interventionniste, sont mobilisés par le pouvoir politique à des fins multiples, et notamment comme un mécanisme de renforcement du sentiment d’appartenance. Cet exemple laisse transparaître que la construction de l’identité passe par la création d’un passé et d’un présent partagés par tous les membres de la communauté. L’avenir et, plus généralement, le processus d’effacement des frontières entre diverses temporalités peuvent, eux aussi, être pensés comme un moyen pour renforcer la cohésion du corps social