Des monuments différents? La commémoration dans le nord de la France, 1914-1940

Le paradoxe naît du fait que la région du Nord veut à la fois se fondre dans l’unité nationale responsable de la victoire et ne pas voir oublier ses drames particuliers. Comment commémorer à la fois l’héroïsme des poilus et les souffrances exceptionnelles des populations civiles envahies et occupées ? Mais les deux positions sont à peu près inconciliables, et la mémoire de l’occupation, des déportations ou du travail forcé, ne dépassera jamais le cadre régional dans les années Vingt et Trente. On a offert aux combattants du Nord, comme à ceux du reste du pays, l’exclusivité du souvenir, à peine partagé ici avec les résistants fusillés. La spécificité de l’occupation n’est donc que secondairement représentée sur les monuments commémoratifs de la région. En revanche, comme partout en France, le pacifisme endeuillé l’emporte.Becker Annette. Des monuments différents? La commémoration dans le nord de la France, 1914-1940. In: Mélanges de l'École française de Rome. Italie et Méditerranée, tome 112, n°2. 2000. Les images de la Grande Guerre en France, Allemagne et Italie. Actes de la table ronde organisée par l’École française de Rome en collaboration avec l’Università di Roma «La Sapienza» et le Deutsches historisches Institut in Rom, 6 et 7 novembre 1998. pp. 515-528