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Ma ch�re amie, je m�ne actuellement une vie bien desagreable par un surcroit d�occupations. Je veux vous en donner une id�e entre nous. Sachez que l�executif et le distributif de l�activit� du Conseil est compos� par une personne, que j�appelle B1, par une autre que j�appelle B2, par votre pauvre Socrate et par un BB3. B1 et B2 ne se sont jamais aim�, comme cela est fort raisonnable. Mais enfin B1 et B2 ont eu deux s��nes dont je n�ai pas vu le semblable. Je n�ai jamais vu deux nobles et fieres poissonneuses, les cheveux epars, les pouces serr�es dans le poing, et au moment de s�imprimer un respect l�un � l�autre qui puisse exprimer par de longs traits d�un rouge fon�� sur un teint d�yvoire, ce qu�elles se doivent, s�enoncer avec une eloquence aussi male et aussi energique. Enfin ces deux B. se sont declar�s qu�ils se meprisent du fond de leurs coeurs, et si vous aviez l�avantage de connoitre les deux B. comme moi, vous diriez que ce sont des gens du tact le plus vrai et le plus exquis vis � vis l�un de l�autre et dans ce cas singulier qu�on puisse trouver dans le monde, ils se sont declar�s qu�ils ne veulent plus parler d�affaires l�un avec l�autre, ce qui est parfaitement bien� pour les affaires, mais ce qui ne m�acomode pas. Enfin, si je n�avois pas Lichtenberg dont je vous ai bien parl�, le seul qui est d�un tout autre etage, je quitterois tout n�t sans regarder les consequences, quelque plaisir que d�autres pussent trouver dans la situation o� je suis. Je veux bien croire que dans d�autres pa�s on trouve exactement les m�mes choses, mais la libert� prodigieuse de celui ci n�oblige pas la petitesse � se servir d�un appareil qui impose. Jugez � cette heure si j�ai des affaires et du plaisir. J�ai pass� ce matin encore un couple d�heures avec la personne extraordinaire dont je vous ai parl� dans mes precedentes. Nous ne pouvons gu�re nous voir qu�une fois par semaine, puisqu�elle est tant enfon��e dans sa famille et dans le monde contre son gr�. Je vous jure, ma Diotime, que je n�ai pas exager� dans tout ce que je vous en ai dit. Elle fait des vers admirables. Elle en fait aussi en anglois et en fran�ois qui vous etonneroient, mais ce que j�y trouve pour moi le plus instructif et le plus admirable c�est la finesse de ses sensations, la precision avec laquelle elle les exprime, et la toute singuliere facult� de se rappeller au parfait les sensations des sa plus tendre enfance, ce qui pourroit � mon avis donner des grandes lumieres dans la connoissance de l�