MANIÈRES DE TABLE

Pour justifier mon intervention sur les bonnes manières et, plus précisé-ment, les manières de table dans notre colloque, je dois invoquer la définition extensive de 'maniérisme', par delà l'acception strictement esthétique du terme, sa dimension socio-culturelle. La maniera, dans l'usage de la Renais-sance, n'exprime pas seulement, on le sait, une tendance à la stylisation dans l'art, mais désigne aussi le style dans la vie, la recherche du raffinement et de l'élégance dans le rapport à autrui 1 • Appliquée au comportement social, la manière marque la conquête de l'homme sur ses pulsions, sa volonté de maî-triser les mouvements ·spontanés, les désordres de la nature et de soumettre l'instinct au contrôle d'un code2 • Traité comme révélateur historique et cultu-rel, le maniérisme soulignerait le goût de la Renaissance pour les conduites af-fectées, les façons et les gestes qui distinguent. La politesse et le savoir-vivre se meuvent toujours à la limite de l'artifice et de la théâtralité: ce serait là le versant maniériste des bonnes manières. Ce mouvement de fond qui traverse le XVIe siècle dépasse, et de loin, le